Guéret : Une aide de 10.000 euros allouée pour venir s’installer dans le cœur de ville
Publié : 23 juin 2021 à 6h28 par
Ça fait le buzz depuis quelques temps : vous offrez 10.000 euros aux habitants qui viennent s’installer à Guéret. Est-ce que vous pouvez nous en dire un peu plus ?
On a été un petit peu dépassés par le buzz qu’a fait cette annonce effectivement ! La Ville de Guéret bénéficie d’une action Cœur de Ville, qui permet de revitaliser le centre-ville, avec notamment des actions en faveur de la restauration des bâtiments, des cellules commerciales, de la rénovation urbaine… Nous avons souhaité compléter tout ce panel d’aides par une aide à l’accession à la propriété pour essayer de ramener sur vers le centre-ville de jeunes ménages surtout, puisqu’on a un public relativement âgé, qu’on souhaiterait un peu plus de mixité, et pour aussi permettre à ces bâtiments fermés et abîmés d’être achetés et rénovés par de jeunes ménages.
J’imagine qu’il y a des conditions ?
Bien sûr. Il y a d’abord des conditions d’achat. Il faut que les travaux représentent 10% du prix de l’achat. Par exemple, si vous achetez un appartement 60.000 euros, il faut au moins 6.000 euros de travaux. La 2econdition, c’est d’avoir des ressources qui ne dépassent pas un certain niveau. C’est tout de même assez confortable, puisque pour une personne seule, cela ne doit pas dépasser les 30.000 euros par an, pour un jeune ménage qui débute on est autour de 50.000 euros. C’est quand même potentiellement de gens qui peuvent acheter un bâtiment.
Ensuite, on leur demande de rester dans ces locaux au moins 5 ans. On va revoir à l’usage si c’est tenable ou pas, sachant qu’on est pas bornés, puisque si un habitant a un accident de vie ou qu’il doit bouger pour des raisons professionnelles on comprendra. Ce qu’on voulait surtout, c’était d’éviter l’effet d’aubaine, avec des gens qui profiteraient de la prime pour acheter, et ensuite revendre les biens dans la foulée.
J’imagine également que pour les primes, il y en a un certain nombre, ce ne sera pas illimité… vous allez devoir faire des choix ? Comment ça va se passer ?
On est d’abord partis sur un panel de 10 primes. Ensuite, on va voir si ça rencontre du succès. On a beaucoup d’appels, beaucoup de gens qui se renseignent, mais cette prime ne fait pas tout. Avant de se lancer dans l’achat d’un appartement, avec l’obtention des prêts, avec le projet de vie qui va avec, il faut du temps. On peut en avoir l’intention sans passer à l’acte. On attend de voir réellement combien d’offres vont se concrétiser, si on a dépassé notre panel de 10 on en reparlera, et on renouvellera ou pas l’opération, peut-être différemment.
Vous espérez attirer des gens d’autres régions ?
Déjà, la Creuse connaît un Boom en matière d’immobilier. Pour le moment, ce sont surtout des maisons individuelles, et un peu à la campagne. Sur Guéret, les maisons individuelles partent comme des petits pains. Maintenant, ce qu’on voudrait effectivement, c’est ramener des gens d’autres régions, ou des gens qui pensent éventuellement aller s’installer en périphérie, les ramener vers le centre-ville pour le faire revivre un peu, et on ne fera pas revivre un centre-ville et ses commerces si on n’a pas d’habitants.
Comment ça va se passer pour le travail ? Si les gens viennent habiter ici, ils sont obligés de trouver du travail… Il y a une aide pour ça aussi ?
On les aide à se loger, mais on n’est pas une agence Pôle Emploi… Par contre, on est en train de travailler avec des partenaires institutionnels qui sont des gros employeurs, comme le centre hospitalier de Lavalette, le Conseil Départemental… On est en train de réfléchir à la possibilité de réserver des emplois à quelqu’un pour le conjoint de quelqu’un qui viendrait travailler à Guéret. On sait que l’emploi à Guéret peut se trouver, ce qui est souvent plus difficile, c’est de trouver de l’emploi pour son conjoint. On est en train de réfléchir à la possibilité d’offrir un panel de choses pour renforcer l’attractivité de la Ville, et ça passe aussi par les écoles pour les enfants etc…
D’où est venue cette idée ?
L’idée, c’était de se dire « on a vraiment tout un éventail d’aide, mais il nous manque quelque chose sur l’accession ». On a surtout beaucoup d’aides sur la réparation, les travaux… Il y a aussi le fait que la Mairie peut acheter des locaux pour les louer ensuite à très bas prix aux commerçants. On n’avait rien en matière d’accession, donc on s’est dit il faut donner un petit coup de pouce à ce niveau-là, parce qu’avant de faire des travaux, il faut acheter ou louer.
Vous êtes étonnée du succès que ça rencontre ? Parce qu’on vous a notamment pas mal vue à la TV…
Tous les médias nationaux, que ce soit la TV ou les journaux, nous ont sollicités. Je savais que c’était un peu original, et les réactions étaient aussi parfois négatives, parce qu’on disait « à Guéret, on est obligés de payer les gens pour qu’ils viennent habiter en centre-ville ». Ça c’est un raccourci qui peut se faire, mais que je n’entends pas, parce que ce n’est pas du tout la philosophie de l’action. Par contre, j’ai trouvé ça très plaisant, parce qu’en soit c’est une petite opération. 10.000 euros, c’est symbolique, mais d’un autre côté ça montre que la Creuse est sous le regard, parce que si on s’est saisi de cette action qu’on venait tout juste de faire sortir du Conseil Municipal, ça montre que les médias nationaux regardent la Creuse.
Depuis le confinement, j’imagine que vous avez un Boom des habitants qui veulent venir se mettre au vert, vous le constatez, vous aussi, sur Guéret ?
Oui, on a beaucoup d’échos d’agences immobilières qui nous disent que les maisons partent comme des petits pains, qu’on n’a même pas le temps de visiter une maison qu’elle est déjà vendue à quelqu’un d’autre. L’intérêt maintenant, c’est de transformer ce souhait en appartement sur le centre-ville, mais il y a vraiment un Boom de l’immobilier qui commence à se détecter.
On a l’impression que le centre-ville a du mal à vivre… C’est le cas ?
C’est très très difficile de faire vivre un centre-ville qui a été déserté. D’abord, on est passés par une étape d’étude. Il a fallu 2 à 3 ans pour savoir ce qu’il fallait faire. On ne se lance pas dans une telle opération, comme ça, à l’aveuglette. Si vous voulez que les gens reviennent habiter, il faut qu’il y ait des commerces sur place. Et si des commerces s’ouvrent, c’est parce qu’ils savent qu’il y a tout un public tout autour d’eux. C’est un cercle qu’il faut considérer dans sa globalité pour pouvoir considérer l’issue, et puis on va surfer sur notre image, qui est l’image d’une ville verte, sportive, les Jeux Olympiques sont là, donc il faut aussi qu’on donne cette image-là, avec des pistes cyclables, et un cœur de ville qui est aussi dédié aux sports de pleine nature.
J’imagine aussi qu’il faut de l’argent, pour faire tout ça. Vous vous retrouvez un peu isolée, depuis le problème qu’il y a eu avec la Communauté. Comment ça va se passer ?
Le problème avec la Com d’Agglo est un problème que je qualifierai de politique, quelque part. Par contre, la Ville de Guéret, la Com d’Agglo et les autres services de l’Etat sont liés par une convention, qui détermine des financements à mettre sur le cœur de ville. On ne peut pas, pour des raisons de mécontentement politique, se dégager des conventions. On continue de travailler avec l’Agglo sur cette convention de cœur de ville, parce qu’elle est importante autant pour nous que pour les communes avoisinantes, qui vont se nourrir d’un cœur de ville de Guéret qui va mieux. Donc on continue de travailler là-dessus. Entre le mécontentement politique et l’opposition que j’ai pu montrer pour l’imposition des guéretois, là aussi il faut garder en tête qu’il y a un gros travail à faire, qu’on a été élus pour ça, et qu’on ne peut pas tout assujettir à un mécontentement politique.
Lorsque vous avez été élue, vous vous attendiez à tout ça ?
J’étais pas tout à fait naïve, je savais que c’est un monde extrêmement compliqué. Je suis une femme, mais je pense être bien armée, et je pense aussi que ça a été une opportunité d’être une femme qui se présente à la Mairie de Guéret. Je m’attendais à ce que ce soit difficile. Sur le plan des relations avec des partis politiques auxquels je n’adhère pas, car je suis sans étiquette, et c’est parfois très compliqué. Ce que j’ai trouvé compliqué, c’était de trouver la ville dans un état que je qualifierai de délabrement certain, qui m’impose de devoir réparer avant de mettre en place mes projets, et ça c’est compliqué parce qu’on a envie tout de suite de mettre en place ce sur quoi on a réfléchi, et on doit d’abord passer par des phases de reconstruction.
Des propos recueillis par Denis Surfys